Plonger la main dans le sable avant de la faire jaillir face au soleil… sentir les grains qui coulent entre les doigts… cascade d’ombre… et se concentrer sur ceux qui s’accrochent, comme pour marquer les formes… ils irritent et râpent la peau aussi… comme pour la mettre à nu.

J’aime la pellicule ! Elle me fait penser à cela. La couche de sels photosensibles est comme ce sable… Pas juste des lignes de code ou quelques phrases qui donnent des ordres… Elle est pour moi comme un lien, sans hiatus, entre les matières du sujet et celles de son “objet image“… entre passé et souvenir. La pellicule est comme cette poignée joueuse lancée dans l'éclat du soleil qui pointe, au Levant... là d’où je viens : l’Orient.

Promesse de lumières à venir, de photographies qui attendent d’être repérées, isolées, captées…

Pour moi, faire des photographies, c’est chercher, à cet instant précis où une forme d’harmonie s’organise dans le viseur de la chambre noire, quand les réglages sont assurés et que je vais presser le déclencheur, une forme de sérénité. Alignement du passé en train de se faire, de la mémoire à la surface… et de l’incertain en devenir. En cette fraction de seconde d’apnée, il me semble avoir trouvé une place...

Par la composition, la balance des contrastes, le choix des formats et des papiers… Par la simplicité apparente née de l’organisation des lignes et des masses... Je n’ai pas d’autre projet que de faire de cette surface plane, imprimée ou insolée, la photographie, un joli bout de matière à partager (si j’ai de la chance !)